Togo / Projet FAME : FeADA renforce les capacités économiques des femmes transformatrices de manioc du groupement ‘‘Mawu Passi’’

Société Civile Médias
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Last Updated on 24/06/2025 by Société Civile Médias

(Société Civile Médias) – Officiellement lancé le 31 mai dernier à Lomé, le projet « Renforcement de capacités et alphabétisation fonctionnelle des femmes et filles-mères pour leur autonomisation », porté par l’association Femmes Actives pour le Développement et l’Autonomisation (FeADA), est actuellement en phase active sur le terrain. En complément des séances d’alphabétisation fonctionnelle déjà entamées, les femmes agricultrices et transformatrices de manioc membres du groupement « Mawu Passi » du village d’Amadenta, bénéficiaires du programme, acquièrent des compétences leur permettant de mieux gérer leurs activités économiques. C’est à cet effet qu’elles ont pris part, du 16 au 18 juin 2025, à un atelier de formation consacré aux activités génératrices de revenus (AGR), visant à renforcer leur autonomie financière.

Cette rencontre s’inscrit dans le cadre de l’axe 3 du projet, qui porte sur l’organisation d’un atelier de formation dédié aux activités génératrices de revenus (AGR), à l’intention des femmes et filles-mères en situation de vulnérabilité. D’une durée de trois jours, cet atelier a rassemblé une trentaine de participantes sélectionnées parmi celles bénéficiant déjà des cours d’alphabétisation fonctionnelle.

D’après l’association FeADA, l’organisation de cette formation répond à une problématique identifiée sur le terrain, notamment auprès du groupement ‘‘Mawu Passi’’, composé d’agricultrices et de transformatrices de manioc.

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En effet, malgré un engagement soutenu dans leurs activités agricoles et de transformation du gari, ces femmes peinent à en tirer des revenus suffisants. Leurs efforts, bien que considérables, ne sont pas à la hauteur des résultats obtenus et les amène à être perpétuellement endettées.

Akoura KAMA-DJONNA, présidente de l’association FeADA.

« Ce déséquilibre est en grande partie lié à un manque de compétences en gestion rationnelle des ressources et des activités économiques. Les femmes investissent beaucoup, mais sans une vision claire des coûts, des bénéfices et de la rentabilité. Ce déficit de connaissance empêche une véritable autonomisation économique et accroît leur vulnérabilité », fait savoir Akoura KAMA-DJONNA, présidente de l’association FeADA.

La présidente de FeADA s’adressant aux participantes à la formation.

C’est dans ce contexte que l’organisation a jugé essentiel de renforcer leurs capacités à travers une formation ciblée sur les AGR. Cette formation vise à leur fournir des outils concrets pour évaluer leurs investissements, comprendre la structure de leurs revenus et prendre des décisions stratégiques. Elle vient également compléter les cours d’alphabétisation fonctionnelle qu’elles suivent, en leur permettant de mieux gérer les aspects financiers et organisationnels de leurs activités. L’objectif de cette démarche est clair : permettre à ces femmes de maximiser leurs gains, d’éviter les pertes liées à une mauvaise gestion, et de tendre vers une véritable autonomie financière et sociale.

Identification d’une AGR et étude du marché

La formation a porté sur l’identification des activités génératrices de revenus (AGR), l’analyse de marché ainsi que sur la gestion financière des initiatives économiques. Elle a été animée par deux formatrices chevronnées, Akouvi HONKOU et Tatiana BAFEYA, toutes deux consultantes en entrepreneuriat et spécialistes de la formation. Celles-ci ont élaboré un programme intensif de trois jours, mêlant enseignements théoriques, études de cas pratiques et échanges interactifs.

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Mme HONKOU, lors de son échange avec les femmes.

Dans le cadre de son intervention, Akouvi HONKOU a conduit une session consacrée à l’identification d’une AGR et à l’étude de marché. Ce module visait à accompagner les participantes dans le processus allant de la conception de leur idée entrepreneuriale jusqu’à sa mise en œuvre opérationnelle.

« Nombreuses sont les femmes qui portent des idées d’activités, mais rencontrent des difficultés à les structurer ou à en apprécier la viabilité économique. Nous avons donc débuté en les accompagnant dans l’identification d’activités génératrices de revenus réalistes, en tenant compte de leurs ressources, de leur environnement immédiat et des besoins du marché local », explique la formatrice.

Akouvi HONKOU, consultante en entrepreneuriat et formatrice.

Par ailleurs, une attention particulière a été accordée à l’étude de marché, notamment à l’analyse des besoins des consommateurs, à l’identification de la concurrence et à la définition de stratégies de fixation de prix cohérentes.

« Il ne suffit pas d’avoir un bon produit, encore faut-il savoir à qui on s’adresse, ce que recherchent les clients, et comment se positionner face aux autres acteurs du marché. Nous avons montré aux participantes comment observer leur environnement économique immédiat, poser les bonnes questions aux clients potentiels et adapter leur offre en conséquence. C’est cette compréhension du marché qui leur permettra de construire des activités viables et durables », souligne Mme HONKOU.

Gestion rigoureuse et durable des AGR

En outre, un des constats majeurs soulevés pendant cette session est le manque de compréhension de certaines notions de base, pourtant essentielles à la rentabilité. Beaucoup de femmes ne savent pas faire la différence entre le capital investi et le profit réalisé. Elles ne tiennent pas de comptabilité, ne gèrent pas de stocks, et ignorent comment tenir un journal des dépenses. Un problème auquel s’est attaqué Tatiana BAFEYA.

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« Prenons un exemple concret. Les productrices de gari comptabilisent uniquement le prix du manioc. Et elles occultent souvent les dépenses intermédiaires comme le transport, les râpes, les sacs, l’emballage, le bois de friture, pour ne citer que ces dépenses, alors que tout cela a un coût. Sans en tenir compte, elles ne peuvent pas réellement savoir si elles font du bénéfice », a insisté la formatrice, qui a axé son intervention sur la planification et le suivi rigoureux des activités. Elle a martelé sur l’importance pour les femmes de savoir évaluer leurs dépenses, suivre leurs ventes et faire le point régulièrement sur la rentabilité de leurs AGR.

« Beaucoup d’entre elles lancent une activité sans en mesurer les résultats. Elles ne savent pas si elles gagnent ou perdent. Résultat : elles doivent sans cesse recourir à de nouveaux crédits pour reconstituer leur capital », observe-t-elle.

Tatiana BAFEYA, consultante en entrepreneuriat et formatrice.

Tatiana BAFEYA a ainsi mis l’accent particulier sur des outils de suivi régulier : tableaux de dépenses, relevés de ventes hebdomadaires, et bilans mensuels et annuels. Elle a également abordé l’élaboration de rapports d’activité, afin que chaque femme puisse évaluer l’évolution de son AGR et en tirer des décisions éclairées.

Dans une démarche d’apprentissage pratique, une initiation à la fabrication de savon liquide a également été proposée, dans l’optique de diversifier les sources de revenus. Cette activité, accessible et à faible coût de démarrage, peut constituer une alternative ou un complément à la transformation du manioc, activité principale de nombreuses participantes à la formation et aussi servir aux femmes à l’usage domestique tout en leur permettant de faire des économies.

Lors de la formation sur la fabrication de savon liquide.

Des participantes désormais aguerries

Au terme des trois jours de formation, les participantes sont reparties non seulement avec des connaissances nouvelles, mais surtout avec une confiance renouvelée dans leur capacité à mieux structurer leurs activités économiques. Pour beaucoup, cette formation représente un nouvel départ ou un tournant décisif dans leur vie socio-professionnelle.

« Avant, je ne faisais pas vraiment le calcul de mes dépenses. Je vendais mon gari sans savoir si je gagnais ou si je perdais. Aujourd’hui, je sais que je dois noter tout : le prix du manioc, le transport, les sacs, même le temps que je passe à travailler. Grâce à ce que j’ai appris ici, je vais pouvoir mieux organiser mon activité et commencer à faire des économies », confie Da Yovo , vendeuse de gari membre du groupement Mawu Passi.

Même son de cloche chez Ayélé , une autre participante.

« Ce que j’ai surtout retenu, c’est l’importance de bien choisir son activité. On ne lance pas un commerce juste parce que les autres le font. Maintenant, je sais qu’il faut étudier les besoins des clients, regarder ce que font les concurrents et fixer un bon prix ».

Pour plusieurs d’entre elles, cette formation est bien plus qu’un simple apprentissage technique. Elle marque le début d’un changement de posture dans la gestion de leur vie économique et sociale.

« Ce que nous avons appris ici va au-delà de nos AGR. On nous a montré comment être plus responsables, comment prévoir, épargner, penser à l’avenir. Nous ne pouvons que dire merci aux initiateurs de cette formation et plus précisément à l’association FeADA et au projet FAME pour cet appui qui va changer beaucoup de chose dans notre vie », affirme fièrement dame Amedebo, présidente du groupement ‘‘Mawu Passi’’.

Le projet FAME, il faut le rappeler, est un projet mené au sein d’un Consortium piloté par le GERES. D’une durée de 4 ans, il est implémenté dans quatre régions de l’Afrique de l’Ouest, Afrique du Nord, Asie du Sud, Amérique latine et les Pays d’intervention sont au nombre de 10, dont le Togo avec comme cible, essentiellement les organisations féministes. L’objectif principal du projet FAME est de renforcer l’autonomisation économique et le pouvoir d’agir des femmes, personnes LGBTQIA+ et OSC féministes des Suds.